Le défi, le courage et la force de l'Ukraine incarnent ce que signifie être européen - la présidente Metsola s'est adressée à la Verkhovna Rada 

 

À l'occasion de la Journée de l'Europe, la présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, était à Kiev pour célébrer les valeurs de paix et d'unité avec le peuple ukrainien. Dans son discours à la Verkhovna Rada, la Présidente Metsola a réitéré le soutien du Parlement européen à l'avenir européen de l'Ukraine.

Monsieur le Président, mon cher Rouslan,
Mesdames et Messieurs les députés,
Chers amis, 
Chers Européens,

L’Union européenne est un projet politique qui s’est fait dans les crises. Un projet d’espoir, de liberté, de démocratie, toutes ces valeurs que l’Ukraine défend sur le champ de bataille. Un projet auquel l’Ukraine a vocation à participer, et que sa présence dans l’Union viendra renforcer. 

C’est à la réalisation de cet objectif que le Parlement européen continuera de concourir. 

Mesdames et Messieurs, 

La première fois que j’ai pris la parole devant votre grand Parlement, le Parlement des Héros, j’ai souligné que l’avenir de l’Ukraine était dans l’Union européenne. Devant vous, je le redis. Nous étions alors à vos côtés, nous le sommes encore aujourd’hui et nous le resterons aussi longtemps qu’il le faudra.

C’est là la meilleure réponse que le monde peut opposer à l’agression russe qui se déroule devant nous. L’Ukraine a fait le choix de l’Europe, comme l’Europe a fait celui de l’Ukraine. C’est là la victoire que nous fêterons ensemble, chaque année, les 9 mai. Et c’est ce que nous fêtons aujourd’hui.

Car, en ce jour, c’est l’Europe que nous célébrons. Cette fête prend tout son sens ici, mieux que nulle part ailleurs. Dans votre pays dont les villes et les villages sont animés de l’esprit de l’Europe, cet esprit où se nourrit la vaillance de votre peuple. 

La détermination de l’Ukraine à ne pas se soumettre, votre courage, votre force — tout cela, c’est être Européen.  Et je suis très heureuse d’être de nouveau avec vous à Kiev aujourd’hui. 

Cela fait 806 jours que la Russie vous livre une guerre barbare, au mépris du droit et sans aucune justification. Ces scènes de destruction, ces images de tant d’innocents qui périssent, sont insupportables. Mais cela fait aussi 806 jours que, sous les yeux de l’Europe et du monde, avec courage, ténacité et détermination, vous résistez à l’agresseur. On dit que c’est souvent dans les instants les plus sombres de notre existence que notre véritable force se révèle avec la plus grande clarté.

Mes amis, 

L’Ukraine, dans l’esprit de l’Europe et du monde, ce sont ces héros, David face à Goliath, qui se battent en dépit de toutes les difficultés. Ces difficultés, je suis là pour vous aider à les surmonter. Et, à cet égard, l’Europe continuera de jouer tout son rôle. 

Le 1er avril 2022, je suis venue à Kiev pour la première fois. Ce jour-là, vous libériez la ville de Boutcha. Jamais je n’oublierai ces images d’horreur que nous avons découvertes ensemble. Jamais non plus je n’oublierai l’héroïsme de ces femmes et de ces hommes ordinaires mettant leur vie en danger pour secourir les victimes, reconstruire ce qui avait été détruit et porter haut les valeurs qui font de nous des Européens.  

Nous savons le sacrifice que vous faites, non seulement pour défendre vos foyers, votre territoire, votre peuple, mais aussi pour protéger la liberté, la dignité et toutes les valeurs qui nous constituent en tant qu’Européens. 

Rappelez-vous, la dernière fois que j’étais devant vous, dans cette enceinte, je vous ai fait trois promesses. C’est trois promesses — je peux le dire fièrement aujourd’hui — l’Union européenne, le Parlement européen, les ont tenues.

Au cours des deux dernières années, nous nous sommes opposés, fermes et résolus, aux manœuvres d’intimidation de Vladimir Poutine et nous avons réduit nos liens de dépendance à l’égard de la Russie. Nous avons adopté treize trains de sanctions très lourdes contre Poutine et ses alliés, et nous travaillons en ce moment à l’élaboration du quatorzième: les avoirs russes gelés dans l’Union européenne se comptent désormais en centaines de milliards d’euros. 

Je vous avais promis que l’Europe ouvrirait ses frontières, et que les Européens ouvriraient leurs foyers et leurs cœurs, à vos familles, enfants et proches, contraints de fuir votre pays. Aujourd’hui, dans l’Union européenne, des Ukrainiens se construisent un avenir et s’assurent de quoi vivre en ayant accès à l’emploi, au logement, aux soins, à la sécurité sociale et à l’éducation, avant, pour beaucoup, de rentrer au pays. Nous avions dit que nous vous aiderions à rebâtir vos villes et vos villages. Adoptée récemment, la facilité pour l’Ukraine, dotée de 50 milliards d’euros, est un moyen très concret d’y parvenir. 

Je vous avais dit également que vous pouviez compter sur moi et sur le Parlement européen pour faire reconnaître les aspirations européennes de l’Ukraine et vous accompagner dans le parcours qui doit conduire votre pays à l’intégration dans l’Union. Et, je tiens ici à vous le dire, nous sommes très fiers que le Parlement européen soit la toute première institution européenne à avoir plaidé pour que l’Ukraine obtienne le statut de candidat et pour qu’elle puisse commencer ses négociations d’adhésion, ce qu’elle a fait l’année dernière. Tout de suite, nous avions pris la mesure de l’enjeu et compris qu’il en allait de la stabilité de l’Ukraine, mais aussi du renforcement de l’Union européenne dans son ensemble. Car cela s’impose comme une évidence sur les plans politique, économique, sociale, géographique et stratégique. Et c’est pourquoi le Parlement européen ne se lassera jamais de répéter que l’Ukraine a toute sa place dans l’Union européenne. C’est vers ce but qu’elle tend; elle y parviendra à son rythme, en suivant la voie qui y est la sienne, et elle n’en déviera pas. 

Monsieur le Président, mon cher Rouslan, lors de notre dernière rencontre, nous avons signé le renouvellement de notre protocole d’accord, confirmant par là-même la relation forte et spéciale qui unit nos deux assemblées. C’est dans cet esprit que le Parlement européen continue d’apporter concrètement son soutien à la Rada d’Ukraine: ainsi, une représentation permanente du Parlement européen ouvrira bientôt ses portes à Kiev.

Il y a neuf jours, nous avons fêté le vingtième anniversaire du plus grand élargissement que l’Union européenne ait connu dans son histoire. Femme ressortissante de l’un des dix pays alors concernés, je n’ai pas oublié les réformes douloureuses que nous avons dû mener et les lenteurs du processus d’intégration, et je ne vous cacherai pas que la tâche ne sera pas facile. Mais, à voir votre détermination et la rapidité de vos progrès, je ne doute pas que nous nous retrouverons pour fêter ensemble un anniversaire ô combien important: celui de l’adhésion pleine et entière de l’Ukraine à l’Union européenne. 

Mes amis,

Certes, les institutions et les États membres de l’Union européenne ont déjà fourni une aide politique, financière, militaire et humanitaire importante. Mais cela ne suffit pas, et il faut aller plus loin. En cette phase cruciale de la guerre, le soutien international à l’Ukraine doit se poursuivre, et il doit s’accroître. La Russie ne donne pas de signes de relâchement. Nous ne devons pas en donner non plus. La Russie continuera d’agir comme elle l’a fait jusqu’à présent. Dans cette situation, l’Europe doit se donner les moyens d’affronter les menaces que fait peser le Kremlin. Ces moyens, nous allons nous les donner. N’en doutez pas. 

Pour la Russie, l’avenir de l’Ukraine, ce n’est pas l’Europe. Sa vision de l’avenir, c’est un monde où l’on réécrit l’histoire, c’est la reconstitution des sphères d’influence, ce sont des rideaux de fer qui viennent s’abattre ici ou là, un monde où règne la loi du plus fort et où les libertés individuelles et la dignité de la personne sont foulées aux pieds. Les agissements de la Russie montrent clairement qu’elle veut revenir à un passé que nous avions relégué aux pages les plus sombres des livres d’histoire. Un passé où l’intégrité géographique de l’Europe et sa liberté de choisir avec qui coopérer et comment poursuivre son intégration sont remises en question. Aux yeux de la Russie, l’ennemi c’est la démocratie, la liberté et la vérité. Ce passé, nous n’en voulons plus. Jamais plus nous n’en voudrons. Pourtant, c’est bien cela qui est en jeu actuellement. 

Et c’est pourquoi nous devons être plus que jamais déterminés à ce que chaque enfant ukrainien retrouve sa famille et revienne chez lui. Pourquoi il nous faut faire davantage pour enrayer la machine de guerre de Poutine, en comblant toutes les failles de notre régime de sanctions. Et c’est aussi pourquoi nous devons accélérer les livraisons d’équipements et de systèmes de défense dont vous avez besoin. Mais la bravoure à elle seule ne suffit pas. Et le courage ne saurait être notre seule stratégie de défense. 

Clamons le haut et fort: L’Europe défendra toujours la paix, sans désemparer. Une vraie paix garante de dignité, d’intégrité, de liberté et de souveraineté territoriale. Car nous savons bien que rien de ce qui concerne l’Ukraine ne doit se faire sans elle. J’ai évoqué le retour des enfants ukrainiens. Il nous faut aussi de toute urgence porter notre attention sur la sécurité alimentaire et la sûreté des centrales nucléaires. Ce sont des éléments essentiels pour la vie de notre humanité. 

Il nous faut aussi dire avec netteté de quelle paix nous parlons. Un jour, le Chancelier Scholz a dit: «La paix sans liberté, c’est l’oppression. La paix sans justice, c’est la dictature.» C’est à une paix véritable qu’aspire l’Europe pour notre continent. Cette aspiration, nous avons le devoir de la concrétiser.

Mes amis,

Dans un mois, à la même heure, dans l’Union européenne, les derniers des 400 millions d’électeurs et électrices appelés à désigner un nouveau Parlement européen seront en route pour leur bureau de vote. Le renouvellement des membres de l’institution que j’ai eu la charge de présider sera en bonne voie. Ces derniers mois, je me suis rendue dans les États membres, au côté de mes collègues, pour parler à mes concitoyens, en particulier aux jeunes, afin de les convaincre de ne surtout pas considérer la démocratie comme un acquis définitif, et pour les engager à aller voter. 

La tâche est ardue. Elle l’est d’autant plus dans de nombreux États membres où nous voyons se répandre la désinformation et la propagande orchestrées par des acteurs qui, ouvertement ou sournoisement, sont hostiles au projet européen. Et qui, changeant de discours selon les publics auxquels ils s’adressent, colportent, dans nos sociétés et nos territoires, des messages trompeurs sur l’Europe, à un niveau inédit lors d’élections européennes. Ce phénomène, je le sais, votre pays et votre institution le connaissent bien. Notre parlement et tous ses homologues dans l’Union européenne ont beaucoup à apprendre de la lutte que vous menez contre ce fléau.

Dans ce contexte, il est plus que jamais nécessaire de diffuser le message européen. Mais mon expérience récente sur le terrain m’amène à nuancer ce constat. Sachez que, dans chaque ville et dans chaque village où je suis allée, les habitants, jeunes ou moins jeunes, n’ont cessé de me demander ce que l’Europe fait devant ce qui passe en Ukraine. Et, dans la dernière enquête réalisée par le Parlement européen, les citoyens continuent à exprimer un soutien très appuyé à cet égard. 

C’est pourquoi je demeure persuadée que, le mois prochain, les citoyens de l’Union européenne éliront un Parlement fort qui restera debout à vos côtés, sans défaillance. 

Comme le dit votre hymne: 

La gloire et la liberté de l’Ukraine ne sont pas mortes.
  
Chtche ne vmerla Oukraïny ni slava ni volya.

Vive la démocratie!
Vive la liberté!
Vive l’Europe!
Slava Oukraïni!