Metsola au Conseil européen : cette élection sera le test de nos systèmes 

 

S'adressant aux dirigeants européens lors du dernier Conseil européen avant les élections du Parlement européen, la présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, a déclaré que la réalisation de nos priorités est le meilleur outil de lutte contre la désinformation.

Mesdames, Messieurs, bonjour.

Dans 77 jours débuteront les élections au Parlement européen. 

Nous savons ce qui est en jeu. Nous savons ce dont certains acteurs sont capables pour tenter de déstabiliser notre processus démocratique. Et nous savons combien notre coopération est indispensable pour la bonne tenue de ces élections. 

Au cours de la législature qui s’achève, nous avons fait entendre la voix de l’Europe sur la scène géopolitique mondiale et nous avons défendu notre modèle européen dans un monde en plein bouleversement. Nous sortons renforcés des défis que nous avons relevés – parce que nous les avons relevés, et non malgré cela. Nous avons assuré la cohésion d’une majorité européenne constructive, qui doit perdurer. 
 
L’Europe œuvre au service de ses citoyens, mais nous devons être capables de porter ce message dans chaque État membre. Je remercie donc vos gouvernements pour leur coopération à l’appui de la campagne du Parlement européen. En compagnie d’autres députés, je me suis rendue dans un grand nombre de vos pays pour sortir de la bulle bruxelloise et travailler à convaincre nos concitoyens, et en premier lieu les jeunes, de se rendre aux urnes. 

La tâche est ardue, et ce d’autant plus que dans plusieurs États nous voyons certains relayer, en connaissance de cause ou non, de fausses informations, voire de la propagande, venues d’acteurs hostiles au projet européen. Ces derniers sont déterminés à cibler des secteurs choisis de nos sociétés et de nos populations et à colporter des récits trompeurs sur l’Europe, à un niveau inédit lors d’élections européennes. Nous devons être prêts à contrer cette menace. 

Nous disposons pour cela d’outils tant législatifs que non législatifs, notamment en ce qui concerne les réseaux sociaux. En matière législative, nous pouvons nous appuyer sur le règlement sur les marchés numériques, le règlement sur les services numériques, la législation sur l’intelligence artificielle, le règlement sur la publicité à caractère politique et la législation européenne sur la liberté des médias. Mais en parallèle, nous devons pouvoir être plus actifs en ligne. 

Nous ne pouvons rester sans réagir face à la propagation de ces versions, cette propagande, ces fausses informations délétères. Nous devons aussi être conscients que lorsque nous adoptons un texte, la réalité numérique a déjà changé. Il nous faut composer avec cette évolution constante du monde numérique, et pour cela, nous devons être prêts à travailler avec les plateformes. 

Les prochaines élections seront une épreuve de vérité pour nos systèmes et diffuser notre message est à ce titre tout à fait essentiel. 

J’en appelle donc à résister à la tentation, au cours de cette campagne difficile, de rejeter sur Bruxelles la responsabilité de tous les dysfonctionnements sans jamais saluer son action quand il y a lieu de le faire. 

Nous devons présenter ouvertement et honnêtement tant ce que nous avons bien fait que ce que nous aurions pu mieux faire, nos décisions qui ne correspondaient pas aux attentes de nos concitoyens,  les situations où des Européens se sentent oubliés, et les cas où notre bureaucratie nous a aliéné nos concitoyens. 

Nous devons tenir compte de nos entreprises, de nos agriculteurs, de notre jeunesse. Nos concitoyens doivent avoir confiance dans le processus démocratique. Ils doivent aussi avoir accès aux outils et disposer des moyens qui leur permettront d’agir, faute de quoi, ce processus est voué à l’échec. Et s’il est mal compris, il risque d’éloigner des urnes de plus en plus de nos concitoyens et de les pousser à chercher du réconfort dans les extrêmes. 

Tout cela ne ferait que donner du grain à moudre aux acteurs qui continuent de voir l’Europe comme une menace, et qui souhaitent ardemment notre affaiblissement.

L’Union européenne n’est pas parfaite, mais elle est la meilleure des garanties pour l’ensemble de nos citoyens. Sur certains points, elle doit être améliorée, et nous le ferons. Mais nous devons continuer à construire, plutôt que de laisser le champ libre à un cynisme destructeur. 

Nous pouvons construire une Europe plus forte, plus à l’écoute de ses citoyens, plus opérante, efficiente et efficace. Une Europe qui soit, pour reprendre la formule célèbre de Jean-Claude Juncker, très visible sur les grands enjeux et plus discrète sur les questions de moindre importance. 

Et il n’est pas de plus grand enjeu que la menace sur la paix que fait peser la Russie. Nous devons continuer de faire tout ce qui est en notre pouvoir pour aider l’Ukraine à continuer de se défendre.

Nous avons déjà apporté un soutien politique, diplomatique, humanitaire, économique et militaire résolu à l’Ukraine; le Parlement européen se félicite à cet égard de l’adoption du 13e train de sanctions, ainsi que du fonds d’assistance à l’Ukraine au titre de la facilité européenne pour la paix. 

En ce moment décisif, notre soutien à l’Ukraine ne saurait faiblir. Nous devons accélérer et accroître la fourniture des équipements dont l’Ukraine a besoin. 

Nous devons également aider l’Ukraine en prolongeant les mesures commerciales autonomes.  L’accord provisoire auquel nous sommes parvenus cette semaine vise à aider l’Ukraine tout en protégeant nos agriculteurs et notre marché intérieur.

Il comprend une liste plus longue de produits sensibles et un délai raccourci pour l’activation de la mesure de sauvegarde automatique. Ces changements devraient contribuer à éviter les distorsions de marché. 

Nous devons également poursuivre nos efforts pour garantir la justice et la responsabilité et, in fine, faire advenir la paix.

Notre projet de paix dépend de notre capacité à assurer notre sécurité et notre autonomie. Dès lors, si nous voulons réellement protéger notre sécurité collective, il nous faut également agir pour mettre en place un nouveau cadre de sécurité pour l’Union européenne.  

Pour concevoir cette nouvelle architecture, nous sommes déjà parvenus à un accord sur plusieurs aspects, que beaucoup d’observateurs jugeaient impossibles à régler.  Nous devons maintenant nous préparer à la prochaine étape d’une coopération qui nous réunisse tous. Dans la réalité qui est la nôtre aujourd’hui, il ne sert à rien de faire cavalier seul. 

Voilà pourquoi l’élargissement reste une priorité. Pour l’Ukraine, la Moldavie, la Géorgie et la Bosnie-Herzégovine. Pour nous tous. 

Bien sûr, tous ces pays doivent suivre leur propre trajectoire jusqu’à remplir tous les critères requis; or, en particulier dans le cas de l’Ukraine, les progrès accomplis dans ce domaine sont impressionnants. 

Ces douze derniers mois, la Moldavie et la Bosnie-Herzégovine ont également progressé à pas de géant dans leurs réformes. Le temps est donc venu de tenir notre parole. Il est temps d’ouvrir les négociations d’adhésion avec la Bosnie-Herzégovine et d’envoyer un signal clair aux populations des Balkans occidentaux. 

Dans ce nouvel environnement géostratégique, notre meilleur investissement dans la paix, la sécurité, la stabilité et la prospérité sera toujours une Union européenne élargie fondée sur des objectifs et critères clairs, ainsi que sur le mérite. 

Cependant, n’oublions pas qu’un élargissement implique également que l’Union évolue, qu’elle s’adapte, qu’elle se réforme. Le Parlement a formulé plusieurs propositions en ce sens, notamment sur son droit d’enquête, qui n’a que peu évolué au cours des 12 dernières années, et sur l’enclenchement du processus devant aboutir à une convention européenne. 

L’élargissement contribuera également au renforcement de la compétitivité européenne et améliorera le fonctionnement de notre marché unique. Cet aspect doit en effet faire partie des priorités de la prochaine législature. Car c’est ainsi que nous développons nos économies de manière durable, que nous remboursons nos dettes, que nous créons des emplois et attirons des investissements, et que nous faisons en sorte que la croissance profite à tous. C’est avec une économie forte que nous pouvons assurer la prospérité, la sécurité et la stabilité, que nous pouvons renforcer la position de l’Europe dans le monde. 

Une Europe forte a un rôle à jouer dans les sables mouvants de l’ordre mondial, notamment au Moyen-Orient. 

La situation humanitaire à Gaza est catastrophique. Nous devons utiliser tous les outils à notre disposition pour faire parvenir davantage d’aide. Je salue l’initiative Amalthea et je souhaiterais tout particulièrement remercier Chypre pour son rôle moteur à cet égard. Néanmoins, l’acheminement terrestre de l’aide demeure le meilleur moyen pour faire parvenir les volumes nécessaires.

C’est pourquoi le Parlement européen continuera de réclamer un cessez-le-feu. C’est pour cela que nous ne cesserons de réclamer le retour des otages toujours captifs, pour cela aussi que nous soulignons que le Hamas ne saurait poursuivre ses agissements en toute impunité. 

C’est pourquoi aussi nous demandons aujourd’hui des conclusions claires sur ce point, qui donneront des orientations sur la voie à suivre.

Ainsi nous pourrons faire parvenir davantage d’aide à Gaza, sauver les vies d’innocents et faire entendre la nécessité de faire appliquer de toute urgence une solution à deux États qui offre de réelles perspectives aux Palestiniens et la sécurité à Israël. 

Une solution apportant une paix qui permette aux Palestiniens de décider pacifiquement et légitimement pour eux-mêmes, et qui garantisse une stabilité durable dans la région.

Cela concerne également la situation en mer Rouge. Je salue l’opération EUNAVFOR ASPIDES qui contribuera à protéger ce corridor maritime hautement stratégique. Mais nous pouvons faire davantage encore. 

Dans l’ensemble de la zone euro-méditerranéenne, des entreprises pâtissent durement des retards, des problèmes d’entreposage et des perturbations financières causés par cette situation. Nous devrions envisager la mise en place d’un groupe de travail, sous l’égide de l’Union européenne, chargé d’examiner la meilleure manière d’agir ensemble pour atténuer les conséquences socioéconomiques de cette crise. Là aussi, l’Europe a un rôle à jouer.

Enfin, puisqu’il s’agit du dernier Conseil européen officiel avant les élections, permettez-moi de vous assurer que le Parlement européen continuera à travailler jusqu’au dernier moment pour progresser sur les dossiers législatifs restants, dont le nouveau train de mesures sur la migration. 

Pour lutter contre la désinformation, notre meilleure arme consiste à donner corps jusqu’au bout à nos priorités et à permettre aux citoyens de constater la différence que fait l’Europe dans leur vie.

Je vous remercie pour votre engagement sans relâche, et merci tout particulièrement à la Présidence belge pour ce qu’elle a déjà accompli jusqu’ici, qu’il s’agisse de législation, de prise en considération des préoccupations des citoyens, de sensibilisation aux élections et d’incitation à la participation électorale, ou encore de l’aide apportée pour que le nouveau Parlement soit prêt pour sa transition.

Je vous remercie de votre attention. 


 

You may find here the transcriptions of her speech per language: