Nos différences et notre capacité à nous unir font notre force - La Présidente Metsola s'adresse au Conseil national autrichien 

 

La Présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, est la troisième dignitaire étranger à s'adresser au Conseil national autrichien. En ce jour historique, Roberta Metsola a évoqué l'importance du renouveau et la façon dont l'Europe peut et doit accueillir le changement. "Nous pouvons changer, nous pouvons nous régénérer et nous pouvons le faire en renforçant les fondements de notre projet européen.

Vielen Dank. Merci Monsieur le Président Sobotka,
Mesdames et Messieurs les députés, 
Mesdames et Messieurs, 

C’est pour moi un grand honneur de prendre aujourd’hui la parole devant le Conseil national. Je suis très heureuse d’être ici et de représenter le Parlement européen, après les travaux de rénovation qui ont transformé ce magnifique bâtiment en un symbole, le symbole d’une démocratie plus transparente, plus durable et plus accessible. 

C’est à cet esprit de changement, de renouveau et de modernisation dont témoigne ce bâtiment que je veux que l’Europe adhère. Nous pouvons changer, nous pouvons nous réinventer, et pour cela, nous devons renforcer les fondements de notre projet européen. 

La nostalgie peut avoir un petit côté réconfortant, mais elle ne saurait guider la politique. Nous devons rester tournés vers l’avenir et avoir la clairvoyance de comprendre que, si nous voulons relever les défis de demain, nous devons aujourd’hui prendre des décisions difficiles. Et nous devons agir en nous inscrivant dans une vision à long terme. Nous ne relèverons pas ces défis si nous nous contentons de reporter les problèmes à la génération suivante. 
 
Notre époque est marquée par de multiples crises. 

Notre continent est confronté à une agression en raison de l’invasion illégale de l’Ukraine souveraine par la Russie, à des coûts énergétiques élevés et à des hausses de prix extraordinaires La population peine à joindre les deux bouts. Les matières premières se font de plus en plus rares. L’inflation pèse sur la croissance. Nous sommes confrontés à une catastrophe climatique impossible à ignorer, à des défis migratoires qui nécessitent une approche globale au niveau de l’Europe entière et à une reprise économique après la pandémie encore trop fragile. 

Mais ce ne sont pas tous ces défis que l’on retiendra de notre époque. Ce qui restera dans les mémoires, c’est notre manière d’y répondre collectivement. Et je suis fière de la manière dont l’Europe a fait face et continue de se battre. 

Tous ces défis concernent l’Autriche autant que le reste de l’Union. C’est à nous qu’il appartient de montrer la voie à suivre. La clé du succès de notre réponse a été notre unité, le fait que nous ayons compris que ce n’est qu’en agissant ensemble que nous pourrons relever ces défis. 

L’invasion de l’Ukraine par la Russie constitue une menace pour l’existence de notre Union, pour notre mode de vie. Nous devons réagir de façon mesurée mais proportionnée. Cette invasion brutale constitue pour nous un point de non-retour. Chaque génération est confrontée à ce genre de point de rupture. C’est maintenant à notre tour d’y faire face.  Et nous savons ce qui est en jeu. Nous savons que nos libertés, nos valeurs et notre sécurité valent bien les décisions à court terme que nous devons prendre. 

Ce qui se passe en Ukraine déterminera les relations internationales dans les années à venir. 

Je ne suis pas partisane de l’absolutisme, mais dans le cadre du projet européen, nous avons fait une promesse aux générations futures: celle de défendre la justice, la liberté, l’État de droit. Même dans les moments difficiles, et surtout dans ceux-là.  Si nous ne le faisons pas, tous nos combats auront été menés en vain, toutes nos promesses risquent de rester lettre morte et nous pourrions perdre nos précieux acquis.  

Notre soutien doit demeurer inébranlable. Ce ne sera pas chose facile, mais il est évident que nous n’avons pas le choix. La situation actuelle nous a amené à repenser notre politique de sécurité et de défense. Le débat sur notre autonomie stratégique a été propulsé au premier rang de nos priorités. Le contexte actuel a influencé notre manière d’aborder la transition numérique et écologique et continuera de le faire. 

Et cette double transition, nous ne pourrons la réaliser que si nous parvenons à mettre en place un cadre adéquat pour une croissance économique durable et verte. C’est ainsi que nous pourrons rembourser nos dettes, que nous pourrons nous attaquer aux problèmes de pauvreté intergénérationnelle qui affectent nos sociétés, que nous donnerons de l’espoir aux jeunes et que nous réaliserons nos ambitions en matière de climat. Parce que ces changements que nous devons mettre en place ne concernent pas seulement l’écologie; ils touchent aussi à la croissance durable, à la sécurité et à la possibilité pour les citoyens d’augmenter leurs revenus. Il en va de la résilience future de nos économies. Et l’enjeu de tout cela est de rendre ce projet plus fort que nous ne l’avons trouvé. 

Mais nous devons faire davantage pour atténuer les répercussions économiques et sociales de ces décisions. Nous devons mieux expliquer le pourquoi et le comment de ce que nous faisons, et en quoi les changements sont nécessaires. Nous devons être davantage à l’écoute de nos agriculteurs et du secteur agricole, par exemple. 

Comme quelqu’un me l’a dit récemment, il y a une limite à ce que les gens peuvent accepter. Les citoyens doivent avoir confiance dans le processus et ne pas se sentir lésés. Autrement, nous courons à l’échec. 

Voilà un exemple de l’Europe du renouveau dont j’ai parlé au début. Je veux que les gens retrouvent ce sens du projet européen, cet enthousiasme pour l’Europe.  Une Europe pour tous, où chacun d’entre nous puisse vivre. Je sais que l'Autriche et ce Parlement ont fait un excellent travail pour lutter contre l'antisémitisme, par exemple, et pour faire avancer les choses au niveau européen et montrer l’exemple pour tous. Je vous remercie, Monsieur le Président, pour votre initiative et pour le leadership dont vous avez fait preuve à cet égard.

L’Union européenne défend ses valeurs. Et nous devons en être fiers. Le Parlement européen appartient aux citoyens autrichiens autant qu’à tous les autres qu’il représente. Aucune décision en Europe n’est prise sans vous. Beaucoup sont prises pour vous. Et aucune de nos politiques ne peut fonctionner sans l’adhésion des citoyens.

Prenons, par exemple, le dossier migratoire. Le Parlement européen a négocié un compromis difficile — une approche globale qui consiste à protéger nos frontières tout en étant juste pour les personnes ayant besoin d’une protection, à faire preuve de fermeté à l’égard de ceux qui ne remplissent pas les conditions et doivent donc être renvoyés dans leur pays en toute sécurité et, enfin, à se montrer intransigeant à l’égard des réseaux de trafiquants et de passeurs. Nous avons encore beaucoup de progrès à faire, notamment en ce qui concerne les retours.

Nous allons nous y atteler, afin de préserver et de renforcer notre espace Schengen. Un espace Schengen plus fort, c’est une Europe plus sûre. Une Europe aux liens plus étroits, c’est une Europe meilleure. 

Notre Europe n’est pas une entité lointaine. L’Europe ne cherche pas à rendre tout le monde identique ou à devenir homogène; nous comprenons que nous sommes différents, que nous avons des cultures différentes et que nous avons des réalités nationales. Ce sont nos différences et notre capacité à nous unir qui font notre force — les 19 députés autrichiens, dont deux sont vice-présidents du Parlement européen, le savent bien. 

Cela ne veut pas dire que notre Union est parfaite. Elle ne l’est pas — et je partage de nombreuses frustrations à l’égard de certains de nos processus — mais en fin de compte, le jeu en vaut la chandelle. Cette Europe, nous pouvons l’améliorer. 

Elle en vaut la peine. Elle vaut la peine qu’on y consacre son temps, son énergie, sa confiance, malgré l’insatisfaction qu’elle peut parfois susciter, malgré ce qu’elle coûte.

En tant que Présidente du Parlement européen, j’ai consacré mon mandat à aller parler aux citoyens dans les villes, les villages et les écoles de toute notre Union. À écouter les Européens pour savoir comment faire en sorte que l’Europe fonctionne pour eux. À rapprocher le Parlement européen des parlements nationaux — et je sais combien cela est important pour ce parlement national, en particulier. 

Ce que je veux dire, c’est que nous devons mieux expliquer la valeur de l’Europe. Et nous ne devons pas craindre le changement. Les prochaines élections européennes auront lieu du 6 au 9 juin 2024. Et je sais qu’avec les députés européens et les députés autrichiens engagés, nous pouvons continuer à œuvrer à cela, nous pouvons continuer à écouter, à convaincre et à expliquer, en particulier pour les jeunes autrichiens qui, à 16 ans, seront autorisés à voter pour la première fois l’année prochaine.

Comme Mozart l’a dit un jour, et je cite: «Nous vivons en ce monde pour nous efforcer d’apprendre toujours, pour nous éclairer les uns les autres au moyen d’échanges d’idées...»

C'est la raison d’être du Parlement européen. C’est la raison d’être de l’Europe. 

Je vous remercie.