S'adressant au Parlement portugais, la Présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, a déclaré que l'Europe avait la capacité de donner le ton dans le monde entier, de diriger, de renforcer et de réformer. "Nous devons continuer à fournir des solutions en matière de migration, de changement climatique, d'innovation numérique, d'énergie et de croissance, en rapprochant notre projet des citoyens".
Senhor Presidente, Mesdames et Messieurs, Ilustres Deputados desta Assembleia da República,
É uma honra poder estar aqui hoje, a representar o Parlamento Europeu.
Cet honneur qui m’est fait témoigne de l’engagement du Portugal envers l’Union européenne, ainsi que de son respect pour la démocratie parlementaire européenne et pour les principes fondamentaux de l’Europe. En particulier ici, dans le plus européen des parlements.
C’est merveilleux de revenir au Portugal, ce pays qui représente l’essence même de ce qu’est l’Europe. Je me sens chez moi ici, parmi ces habitants qui incarnent les valeurs de résilience, de solidarité et de vivre-ensemble que l’Europe doit revêtir. C’est ça, «l’effet Portugal».
Les défis sont nombreux. Une guerre fait rage sur notre continent à cause de l’invasion illégale de l’Ukraine souveraine par la Russie. Nous avons connu des hausses de prix et des pénuries d’énergie. Trop de personnes peinent encore à boucler leurs fins de mois. Les matières premières se font de plus en plus rares. L’inflation pèse sur la croissance. Nous sommes confrontés à une catastrophe climatique impossible à ignorer, à des défis migratoires qui nécessitent une approche globale au niveau de l’Europe entière et à la fragilité de la reprise économique après la pandémie.
Chers amis, ce ne sont pas tous ces défis que l’on retiendra de notre époque, mais plutôt notre manière de les surmonter. Et je suis fière de la façon dont l’Europe a résisté et continue de résister.
En février 2022, quelques jours après l’invasion russe en Ukraine, j’ai rencontré à Strasbourg un groupe de femmes et d’enfants qui venaient de quitter Kiev. Je leur ai demandé où ils se rendaient et ils m’ont répondu «Porto», une ville à l’autre bout du continent. C’était un échange empreint d’émotion, mais qui prouve que, même dans les pires moments, vous n’avez pas fui vos responsabilités. Les maires de vos villes et de vos villages n’ont pas pris la distance comme prétexte pour se montrer indifférents. Vous vous êtes battus et avez donné de l’espoir aux gens. Vos villes, notamment Lisbonne, ont participé à la campagne «Générateurs d’espoir» visant à fournir de l’électricité à l’Ukraine. Et pour tout cela, pour toutes vos contributions aux efforts communs en faveur de la survie de l’Ukraine, et pour tout ce que vous continuez à faire, je vous remercie.
Il est vrai que le Portugal sait mieux que la plupart des pays comment surmonter les défis géographiques. L’Europe commence sur votre territoire. Les liens uniques que vous entretenez avec l’Amérique latine, l’Afrique ou encore l’Asie vous ont permis d’incarner une Europe dotée de qualités de communication et d’écoute universelles qui favorisent une compréhension commune et protègent le multilatéralisme.
Corvo, cette île de 17 km2 située dans les Açores, est aussi éloignée des États-Unis que de Bruxelles. Elle est notre ouverture sur le monde. Elle est l’Europe.
On m’a raconté qu’une fresque avait été peinte dans la bibliothèque publique de l’île à l’occasion de la Journée de l’Europe en 2017. Elle représentait Jacques Delors et José Mendonça Machado, le plus ancien résident de Corvo. Le message était clair: M. Mendonça Machado est aussi européen que le Président Delors. Nous l’avons entendu, partout.
Aucun endroit d’Europe, aussi éloigné soit-il, ne saurait nous indifférer. C’est là notre défi commun. C’est la raison pour laquelle nous mettons en place une législation européenne qui permette aux îles comme les Açores ou Madère d’obtenir davantage de ressources pour se développer.
C’est ainsi que nous parviendrons à tirer notre continent vers le haut. Nous pouvons nous renouveler, tout en renforçant les bases de notre projet européen d’une façon à la fois durable et socialement juste. C’est une question d’avenir.
Avec mes collègues, nous arrivons tout juste du Parlement européen, où nous avons voté la législation la plus avancée au monde en matière d’intelligence artificielle. Nous avons élaboré une loi, fondée sur les valeurs de l’Union, qui fait de nous des chefs de file mondiaux en matière d’innovation numérique.
À l’avenir, nous devrons fixer des limites stables et claires à l’intelligence artificielle. Nous stimulerons l’innovation, mais sans jamais transiger sur un élément: les progrès de la technologie devront toujours respecter les droits fondamentaux et les valeurs démocratiques.
Nous devons repenser notre manière de légiférer et notre façon de penser. Une nouvelle ère a commencé et, avec elle, la menace que des acteurs malveillants utilisent la technologie pour nuire à nos démocraties. Il s’agit d’une menace hybride d’un nouveau genre à laquelle nous devons faire face ensemble.
L’Europe peut servir de modèle au monde entier. Nous pouvons montrer la voie. Et nous pouvons le faire à notre manière: en faisant preuve de responsabilité.
C’est également cette éthique que nous souhaitons voir mise en œuvre dans notre réponse aux défis migratoires. Alors que les États membres se sont finalement accordés sur la marche à suivre en matière de migration, le dernier naufrage en Méditerranée a jeté une ombre sur ce moment historique. Encore des vies perdues au large de nos côtes. Encore des mères qui attendent des nouvelles qui ne viendront jamais. L’urgence de parvenir à un accord sur les sujets de migration et d’asile est réelle. Je suis convaincue que nous pouvons trouver une approche à la fois respectueuse des frontières, juste et humaine envers celles et ceux qui ont besoin de protection, ferme avec ceux qui ne sont pas éligibles, et sévère avec les trafiquants qui exploitent les personnes les plus vulnérables de la planète.
C’est la stratégie européenne.
Et c’est la stratégie portugaise.
Nous n’avons pas besoin de réinventer la roue, mais nous pouvons mieux intégrer la population à nos prises de décision, renforcer nos liens avec les parlements nationaux et sensibiliser davantage les citoyens au pouvoir qu’a l’Europe de rendre leur vie un peu plus facile, un peu plus sûre et un peu plus juste.
À un an des élections au Parlement européen, voici le message que je souhaite adresser aux citoyens: L’Europe compte. Votre voix et vos choix comptent. Votre vote compte.
L’Europe, ce n’est pas les institutions. L’Europe, c’est le peuple. Je ne suis pas là pour vous dire que l’Union européenne est parfaite. Bien sûr, je partage de nombreuses frustrations liées à certains de nos processus, mais je suis ici pour dire que l’Europe peut s’améliorer si nous agissons ensemble.
Je suis ici pour inviter tout le monde, en particulier les jeunes, à ne pas céder à un cynisme facile, à ne pas se laisser doucement glisser vers les extrêmes et les franges politiques.
Pour y parvenir, nous devons continuer à écouter les gens. Nous devons continuer à convaincre. Nous devons continuer à agir. Nous devons montrer aux citoyens les bienfaits tangibles de l’Europe. Nous devons avoir le courage d’aller au-delà des beaux discours et nous devons être honnêtes. Honnêtes quant à nos échecs, mais également honnêtes quant à nos réussites. Or, nous avons de quoi être fiers.
C’est à nous qu’il appartient de montrer l’exemple et de mieux transmettre la valeur de l’Europe. Et nous ne devons pas craindre le changement. Nous sommes en plein élargissement: ce qui a fonctionné à 27 ne fonctionnera pas de la même manière à 30 ou 33. Nous devons être prêts à nous renforcer et à réformer. Ce ne sera pas chose facile, mais il est évident que nous n’avons pas le choix. L’année dernière nous a amenés à complètement repenser notre politique de sécurité et de défense. Le débat sur notre autonomie stratégique a été propulsé au premier rang de nos priorités. Le contexte actuel a influencé notre manière d’aborder la transition numérique et écologique et continuera de le faire.
Vous êtes d’ailleurs bien placés pour le savoir. Alors que les énergies renouvelables ne couvraient que 52 % de votre consommation totale d’électricité au début de l’année 2022, la proportion a grimpé à 88 % en janvier 2023. C’est ça, l’avenir.
Nous ne pourrons cependant réaliser cette double transition que si nous parvenons à mettre en place un cadre adéquat pour une croissance économique durable et verte. C’est ainsi que nous pourrons rembourser nos dettes, que nous pourrons nous attaquer aux problèmes de pauvreté intergénérationnelle qui affectent toutes nos sociétés, que nous donnerons de l’espoir aux jeunes et que nous réaliserons nos ambitions en matière de climat.
En effet, ces changements ne se résument pas à une simple transition écologique. Ils impliquent aussi d’agir sur la croissance et la sécurité, d’aider les citoyens à disposer de revenus plus confortables et à accéder à un logement, ainsi que de protéger durablement nos économies. En somme, il s’agit de renforcer notre projet d’origine.
Nous devons faire davantage pour atténuer les répercussions économiques et sociales de ces décisions. Nous devons mieux expliquer pourquoi et comment nous le faisons, car aucune de nos politiques ne portera ses fruits si nous n’impliquons pas davantage ceux qui nous élisent, celles et ceux qui s’en remettent à nous pour concrétiser leurs attentes. C’est ce que j’entends par «Europe du renouveau». Je veux que les gens retrouvent ce sens du projet européen, cet enthousiasme pour l’Europe.
L’objectif de l’Europe n’est pas l’uniformisation. Nous savons bien que nous sommes différents, que nos cultures comme nos réalités nationales ne sont pas les mêmes. Ce sont nos différences et notre capacité à nous unir qui nous rendent forts.
Le Parlement européen appartient aux citoyens portugais autant qu’à tous les autres qu’il représente. Aucune décision en Europe n’est prise sans vous. Beaucoup sont prises pour vous. Et beaucoup sont orientées par vous.
L’Europe en vaut la peine. Elle vaut la peine qu’on y consacre son temps, son énergie, sa confiance, malgré l’insatisfaction qu’elle peut parfois susciter. Elle vaut la peine d’être financée.
Vous êtes l’Europe. Vous êtes la raison d’être de l’Europe. Et l’Europe n’existerait tout simplement pas sans vous.
Pour tout cela, merci le Portugal.
Merci d’avoir fait preuve de solidarité et d’avoir montré l’exemple à l’Europe au cours des 38 dernières années.
Merci d’avoir contribué à la construction de notre Europe.
Maintenant, rendons-la plus forte.
Obrigada.