Discours de la Président Roberta Metsola devant la Knesset, le Parlement israélien 

 

Roberta Metsola, Présidente du Parlement européen, s’est exprimée en séance plénière extraordinaire de la Knesset, le Parlement israélien. Dans son discours, la Présidente Metsola a déclaré que le Parlement européen serait toujours un allié fort dans la recherche de la paix.

Monsieur le Président,
Monsieur le Premier Ministre,
Mesdames et Messieurs les parlementaires,

Erev tov, shalom lekulam.

C’est un grand honneur pour moi de me trouver ici avec vous à Jérusalem. Dans ce lieu marqué par l’histoire, le destin, l’espoir. À la Knesset, ce lieu de démocratie, de liberté et de résilience. 

Je suis ici pour apporter le message de l’Europe, pour souligner que le lien qui unit nos peuples est profond et qu’il s’est forgé dans l’horreur de notre histoire commune. Un lien noué dans la souffrance et le salut. Un lien dont la force réside dans l’ouverture, l’honnêteté, la sincérité – voire l’esprit critique –, mais un lien qui a résisté et résistera à l’épreuve du temps. 

C’est ma première visite – ce ne sera pas la dernière – et j’ai voulu venir au début de mon mandat pour envoyer un signal de notre volonté de dialogue. Pour souligner l’engagement du Parlement à renforcer nos liens et montrer que l’Union européenne et Israël partagent davantage que l’histoire.

Aujourd’hui, je veux mettre l’accent sur l’avenir. Sur le partenariat solide qui existe entre l’Europe et Israël et sur la manière dont nous pouvons continuer à le développer. Sur le renforcement des liens entre le Parlement européen et la Knesset. Je suis ici pour parler de l’amélioration des liens dans les domaines de la culture, de la science, du commerce, de l’éducation, des arts, de la recherche et de la technologie. Pour parler de la paix. Pour parler de l’avenir que nous devons affronter ensemble. 

Je suis optimiste, mais je ne suis pas aveugle aux défis auxquels vous êtes confrontés. Aux menaces – pour certaines existentielles – auxquelles vous faites face; aux difficultés de faire vivre une démocratie dynamique. Je suis optimiste parce que je sais que ces défis peuvent être surmontés.
Il est inconcevable, pour beaucoup en dehors d’Israël, que le droit à l’existence d’Israël soit encore remis en question. Je vais être claire: l’Europe soutiendra toujours le droit à l’existence d’Israël. 

C’est John F. Kennedy qui a déclaré: «Israël n’a pas été créé pour disparaître – Israël vivra et prospérera. C’est l’enfant de l’espoir et la maison des braves.»

J’ai pu le voir par moi-même lorsque j’ai rencontré des jeunes à l’université de Tel Aviv hier. Des étudiants de différents horizons qui souhaitent vivre et étudier, qui se tournent vers l’Europe, qui partagent des perspectives et qui collaborent avec l’Europe. Ils veulent croire que la paix est possible.

Mesdames et Messieurs, 

La paix est difficile – mais en Europe, nous savons que la paix est possible. La paix dans la sécurité. La paix dans la liberté. La paix dans la dignité. La paix dans la justice.

Le rabbin Jonathan Sacks a écrit: «La paix est un paradoxe, elle n’a pas la pureté et la clarté de la guerre, dont les enjeux – la défense de son pays, l’honneur national, le patriotisme, la fierté – sont limpides et semblent s'imposer. La guerre parle à notre sens de l’identité le plus fondamental: il y a «nous» et il y a «eux», il y a des ennemis et des amis, et il n’est pas possible de les confondre. Mais lorsque des ennemis se serrent la main, qui est «nous» et qui est «eux»?»

La paix n’est pas chose aisée. C’est vivre avec des différences dans le respect mutuel que requiert la coexistence. C’est la justice. C’est l’égalité des chances. Ce sont des parents qui voient un avenir pour leurs enfants. 

L’Europe est composée de peuples issus de différentes communautés, avec des cultures, des nations, des croyances et des traditions différentes. Le rôle de notre Parlement est de veiller à ce que tout le monde soit inclus dans notre Europe – que personne ne soit laissé pour compte. Je crois, comme beaucoup ici, en la capacité de la démocratie parlementaire et de la diplomatie parlementaire à susciter des changements positifs. 

Il nous appartient de veiller à éduquer et à lutter contre les discours toxiques. L’ignorance favorise la peur et la méfiance. L’ignorance favorise la haine. Et l’éducation est la meilleure arme pour lutter contre les préjugés et combattre l’extrémisme. 

J’ai eu l’honneur de me rendre aujourd’hui à Yad Vashem. Un rappel émouvant des vies perdues, des enfants assassinés uniquement parce que leurs grands-parents étaient juifs, mais aussi des souvenirs à jamais préservés. 

C’est avec douleur que nous constatons aujourd’hui une montée de l’antisémitisme. Nous savons que c’est un signal d’avertissement pour l’humanité. Et c’est important pour nous tous.

Je le dis sans ambiguïté: être antisémite c’est être antieuropéen. Et chaque jour, nous voyons se produire des attaques contre des Juifs, contre des synagogues. Des lieux voués à la paix, à Dieu et au culte restent des cibles. 

Le Parlement européen a la ferme volonté de briser le cycle. De combattre l’antisémitisme. De veiller à ce que nous nous souvenions des calamités passées et à ce que les leçons de l’histoire ne soient jamais oubliées. Nous avons le devoir de nous souvenir, même lorsque les voix des survivants ne peuvent plus se faire entendre.

Le Parlement européen est conscient de sa responsabilité à cet égard. La première femme Présidente de notre Parlement, Simone Veil, matricule 7-8-6-5-1, a survécu au déchaînement de l’horreur et du mal à Auschwitz, pour changer le visage de l’Europe. Notre engagement est donc autant personnel qu’institutionnel. Et je m’engage envers vous à ne pas faiblir. 

Chers collègues parlementaires,  

Mon message aujourd’hui est un message d’espoir. Espoir de paix. Espoir d’apaisement. Espoir pour l’avenir. Espoir de justice. Espoir dans la certitude de la conviction. Conviction de la volonté des citoyens et de la capacité de notre génération à surmonter, à relever les défis qui se sont dérobés aux générations passées.

C’est ce sentiment d’espoir, cette charge historique, cette conviction qui ont motivé la réaction de l’Union européenne à l’invasion de l’Ukraine.

Poutine a ramené la guerre en Europe. Une ignoble invasion d’une Ukraine souveraine et indépendante. Aujourd’hui, les fondements mêmes d’un ordre mondial fondé sur des règles ont été ébranlés. 
Poutine menace à présent le monde de l’utilisation de l’arme nucléaire. Nous devons agir ensemble et faire tout ce qui est en notre pouvoir pour empêcher la Russie d’utiliser – et d’autres acteurs non démocratiques d’acquérir – des armes nucléaires qui entraîneraient davantage de victimes et de destructions irréparables. 

La guerre en Ukraine n’est ni locale ni régionale. L’impact de ce qui se passe en Ukraine se fait également sentir en Israël. Depuis le début de la guerre, près de 6 millions d’Ukrainiens ont dû fuir leur pays – dont environ 27 000 ont trouvé refuge ici en Israël. Ils suivent les pas de l’une des grandes personnalités d’Israël, Golda Meir, née il y a 121 ans à Kiev. 

La Russie menace la sécurité alimentaire mondiale en détruisant les cultures, en bloquant les voies de transport et en provoquant une pénurie artificielle de denrées alimentaires. L’insécurité alimentaire est source d’instabilité et de chaos et contraint les populations à quitter leur foyer et leur pays. Elle peut perturber des équilibres sensibles, loin de la source des événements. C’est pourquoi la communauté internationale doit rester ferme et unie pour veiller à ce que les sanctions à l’encontre de la Russie soient efficaces et ne permettent pas d’exploiter des failles.

Mesdames et Messieurs, 

Ces derniers mois, j’ai dû parler de guerre. Pourtant, la base et l’objectif ultime du projet européen sont la paix. La paix, la démocratie et la liberté – des objectifs essentiels pour l’avenir de l’Europe, d’Israël et de cette région. 

Et je veux le dire ici: ceux qui prônent la violence n’ont pas les réponses. 

La violence n’a jamais été une solution. Le terrorisme n’est jamais justifié. Il n’y a pas d’excuses à la terreur. Chacun mérite de vivre sa vie, d’envoyer ses enfants à l’école, de marcher dans la rue sans crainte. La terreur n’a pas brisé et brisera pas cet esprit.

L’Europe consiste à rassembler les peuples, à défendre les principes qui nous ont conduits des cendres de la guerre et de l’Holocauste à la paix et à la prospérité. 

Le Parlement européen soutient fermement le processus de paix au Proche-Orient. Nous soutenons une solution fondée sur la coexistence de deux États – un État israélien assuré de sa sécurité et un État palestinien indépendant, démocratique, d’un seul tenant et viable, vivant côte à côte dans la paix et la sécurité. 

Je sais que certains ne sont pas d’accord. Et je sais qu’il y a eu de multiples faux départs dans ce processus. Je sais que tout le monde ne voit pas la paix comme un objectif. Et je sais à quel point il doit être difficile de dire à une mère dont l’enfant a été tué que la paix est la réponse. Et il y a trop de mères qui ont vécu ce drame. Beaucoup trop.

Mais la paix est la seule voie possible. Le seul moyen pour les Israéliens et les Palestiniens de vivre dans la sécurité et la prospérité. 

Des progrès sont possibles. Les accords d’Abraham pouvaient sembler inconcevables il y a peu, mais ils ont prouvé que l’histoire ne doit pas toujours se répéter. Et que le cycle peut effectivement être brisé. 

Permettez-moi de conclure en soulignant que le Parlement européen sera toujours un allié fort dans la recherche d’une voie à suivre, dans la quête de la paix, et que toutes les ressources à notre disposition seront engagées à cette fin. 

L’histoire de votre grande nation est celle de l’espoir, de la persévérance, de la foi et de la lutte contre l’adversité. Voici le moment où Israël peut montrer la voie au monde non seulement en cherchant mais en trouvant cette paix difficile.

Si j’ai appris une chose, c’est que la manière dont la prochaine génération vit et ce qu’elle apprend n’est pas encore décidée. Que l’avenir n’est pas écrit. 

Ben Gourion a évoqué l’idéalisme chronique du peuple juif. Un trait que je reconnais dans cette grande enceinte, dans cette ville sainte. Le monde a besoin d’une dose de cet idéalisme aujourd’hui.
Nous pouvons ensemble réaliser l’impossible. L’histoire de l’Europe, la pérennité d’Israël en sont la preuve. 

Je vous remercie.