C'est l'heure de l'Europe – la Présidente Metsola à Palerme  

 

C'est l'heure de l'Europe – la Présidente Metsola à Palerme  

Palerme, Italie  
 
 

La Présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, a été accueillie très chaleureusement par les étudiants lors de l'inauguration de la nouvelle année académique à l'Université de Palerme. Dans son discours d'ouverture, la Présidente Metsola a déclaré que l'Europe doit continuer à créer des emplois et à contribuer à la sécurité et à la paix.

       

Monsieur le Recteur,
Mesdames et Messieurs les représentants des autorités régionales et municipales,
Chers collègues,
Chers députés,
Chers professeurs,
Chers étudiants,

C’est un honneur et un privilège de m’adresser à vous aujourd’hui.

À cette occasion, je ne peux m’empêcher d’avoir une pensée pour Giulia Cecchettin, une étudiante comme vous, une jeune femme brillante partie trop tôt, de la manière la plus brutale qui soit. Aucune parole de réconfort ne pourra jamais la ramener parmi nous. Nous devons faire davantage pour les femmes.

Aujourd’hui, des milliers de personnes sont unies par-delà les frontières.

Je vous invite à honorer la mémoire de Giulia, en faisant non pas une minute de silence, mais une minute de bruit, d’applaudissements si forts qu’ils seront entendus jusqu’à Padoue.

Chères étudiantes, chers étudiants,

Je fais partie des rares personnes en Europe pour qui Palerme est au nord. En effet, j’ai grandi aux portes de la Sicile, m’abreuvant de la culture de votre terre. Une terre tellement chargée de sens. C’est ici qu’ont prospéré certaines des plus grandes civilisations que le monde ait connues. La Sicile entière, par sa centralité, son rôle dans la formation de l’identité européenne, est une belle métaphore de notre Union. 

Elle est un symbole d’ouverture, de dialogue et de synthèse permanents entre des cultures diverses. C’est cela même qui fait de cette île, de la Méditerranée, de l’Europe des lieux de créativité, d’inventivité et de beauté sans pareil dans le monde.

J’étais encore une enfant lorsqu’une brèche s’est ouverte dans le rideau de fer. Si ma génération n’a probablement pas immédiatement saisi la portée considérable de ce moment, j’ai néanmoins bien en mémoire la joie débordante de ces millions d’Européens enfin libres de choisir leur propre avenir. J’ai en mémoire l’émotion tangible de mes parents, alors qu’ils regardaient ces images sur l’écran de notre petit téléviseur. Je ressentais l’espoir de la population, qui voyait soudain son horizon s’ouvrir à l’infini. 

Je repense souvent à ce moment lorsque je pense aux valeurs sur lesquelles repose notre Union européenne.

Pourtant, ces dernières années, il semble que nous nous soyons bercés de l’illusion que la voie que nous avons choisie ne peut que perdurer. Nous avons pris les avantages de la démocratie libérale pour acquis et avons cessé d’encourager les citoyens à se battre pour eux. 

C’était une erreur. Le 24 février 2022, la Russie a lancé son invasion brutale de l’Ukraine indépendante et souveraine. 

Pourquoi avons-nous soutenu l’Ukraine de toutes nos forces? 

Pourquoi lui avons-nous envoyé une aide humanitaire, militaire et financière... et pourquoi continuons-nous à le faire?

Pourquoi le Parlement européen a-t-il été la première institution de l’Union à reconnaître la perspective européenne de l’Ukraine et à demander qu’elle obtienne le statut de candidat à l’adhésion?

Pourquoi nous sommes-nous unis pour adopter plusieurs paquets de sanctions contre la Russie, tout en luttant contre les peurs agitées par le Kremlin et contre ses vagues de désinformation?

Parce que tels sont les engagements que l’Europe a pris depuis des générations: nous défendons la justice, la liberté et l’état de droit. Même quand c’est difficile. Surtout quand c’est difficile. 

Nous devons rester fermes dans notre soutien à l’Ukraine et dans notre réaction forte à l’agression russe. Il s’agit d’une menace pour notre modèle démocratique, pour notre sécurité et pour nos valeurs. Cette responsabilité constitue l’épine dorsale de l’Europe que nous avons construite.

Nous ne pouvons pas non plus ignorer la crise en cours en Israël, à Gaza et dans tout le Moyen-Orient. La situation sur le terrain est horrible, tragique, désespérée. Je l’ai constaté de mes yeux. J’ai rencontré les familles des personnes enlevées par le Hamas. J’ai rencontré des personnes qui pleuraient la disparition de leur famille à Gaza. Voilà pourquoi il importe d’exprimer notre solidarité, de réaffirmer notre condamnation du terrorisme, d’aider à garantir la libération des otages et de continuer à chercher des solutions pour apporter davantage d’aide à ceux qui en ont désespérément besoin. 

Nous devons avoir le cœur assez ouvert pour prendre soin de toutes les victimes innocentes et la tête assez froide pour trouver une solution de paix à long terme, fondée sur deux États, afin de donner espoir aux familles israéliennes et palestiniennes. 

Chers amis,

L’Europe est un projet tourné vers l’avenir. Ce projet a donné aux nouvelles générations la possibilité de voyager, d’étudier, de mener des recherches et de créer des entreprises au sein d’un grand espace de liberté. Grâce à des programmes comme NextGenerationEU, Erasmus+, Erasmus pour jeunes entrepreneurs, la garantie pour la jeunesse, Horizon Europe, InvestEU, le Fonds social européen, les Fonds régionaux et les Fonds pour le développement rural, nous donnons aux jeunes du sud de l’Italie la possibilité de faire valoir leurs talents et de façonner leur avenir. 

La monnaie unique et le marché européen ne sont pas une fin en soi. Leur succès ne peut se mesurer qu’à l’aune des perspectives offertes aux nouvelles générations.

En tant que femme du Sud, je sais bien ce que signifie cette étiquette. En tant que femme du Sud, qui a grandi sur une île, je sais bien comme on peut s’y sentir oublié, ignoré, injustement dévalorisé. Je suis peinée de voir tant de générations d’Italiens du Sud forcés de quitter leur terre à la recherche d’horizons meilleurs. Par conséquent, quand nous parlons de rendre les espaces partagés plus équitables, c’est ici que se situe le point de départ de notre travail.

Après la pandémie, l’Union européenne a mis au point le plan NextGenerationEU pour la relance de l’Europe. La pierre angulaire de ce programme, la facilité pour la reprise et la résilience, constitue la première page du prochain chapitre de la prospérité européenne. 

En nous modernisant, en nous réformant, mais aussi en investissant dans les transitions verte et numérique, nous sortirons plus forts de cette crise et renforcerons notre capacité de résistance aux crises futures.

L’Italie est le plus grand bénéficiaire de la facilité pour la reprise et la résilience. Ce financement européen d’un montant total de 194,4 milliards d’euros constitue une chance sans précédent d’investir dans votre avenir, de créer des centaines de milliers de nouveaux emplois, d’améliorer la qualité de vie et d’encourager les jeunes talents à rester.

L’Italie du Sud recèle un potentiel inexploité qui attend d’être libéré. Il est temps d’inverser la vapeur. Mais ce ne sera pas possible sans accès à des financements et à une infrastructure moderne. Si nous mettons l’accent sur la connectivité, si nous renforçons les capacités des infrastructures, si nous commençons à voir cette région comme la porte d’entrée des débouchés économiques et comme une référence pour les pays de la Méditerranée, alors l’Italie du Sud prospérera. L’Italie prospérera. Et l’Europe toute entière prospérera. 

Ma visite aujourd’hui a aussi pour but de souligner que l’Europe doit être considérée comme une chance. Une chance de trouver des solutions à vos problèmes. 

Nous devons encore trouver une solution durable à la question migratoire; nul ne le sait mieux que les Siciliens. On estime que plus de 650 000 réfugiés ont débarqué sur vos côtes ces dix dernières années. Au nom du Parlement européen, je souhaite exprimer ma gratitude pour la générosité et la résilience dont vous avez fait preuve en assumant cette charge disproportionnée. 

Cela fait dix ans qu’a eu lieu le naufrage à Lampedusa, et depuis, ce cimetière qu’est devenu la mer Méditerranée a englouti plusieurs milliers de femmes, d’enfants et d’hommes. La migration est le défi de notre génération et nous devons répondre avec équité et humanité à ceux qui ont besoin de protection, avec fermeté à ceux qui n’y ont pas droit et avec force aux réseaux criminels qui continuent d’exploiter les plus vulnérables. 

Je vous promets que le Parlement européen continuera à faire tout son possible pour parvenir à un accord sur le nouveau pacte sur la migration et l’asile avant la fin de la législature. 

Chers amis,

Nous parlons trop souvent des droits et des valeurs comme s’il s’agissait de concepts lointains émanant de livres anciens. Si la situation géopolitique actuelle, de plus en plus instable, nous a appris quoi que ce soit, c’est bien l’importance de démontrer chaque jour à quel point ces droits et ces valeurs nous sont indispensables et peuvent changer la vie des gens.

Je pense à deux illustres anciens élèves de cette éminente université: Giovanni Falcone et Paolo Borsellino. Ils ont sacrifié leur vie pour défendre la vérité et la justice. Ce sont mes héros. Ce sont les héros de l’Italie. Ce sont les héros de l’Europe.

La corruption sape les fondations de tout ce que nous avons construit. La corruption tue. 

Pas seulement des juges, mais également des militants, des responsables politiques et des journalistes. À Malte, la corruption a tué Daphne Caruana Galizia, en Slovaquie, Ján Kuciak, et tant d’autres en Europe et dans le monde. Cette corruption, le plus grand ennemi de nos valeurs communes, ne s’arrête pas aux frontières. Si nous voulons prévenir et combattre la corruption, nous devons nous tourner vers l’Europe pour trouver une réponse. 

L’année dernière, la «plateforme pluridisciplinaire européenne contre les menaces criminelles» a saisi plus de 180 millions d’euros et a procédé à près de 1 000 arrestations. Grâce à notre législation contre le blanchiment de capitaux, nous mettons un frein aux financements illicites internationaux. Nous rendons notre espace commun un peu plus sûr, un peu plus beau, un peu plus juste.

Chères étudiantes, chers étudiants,

L’Europe que je veux doit mettre l’accent sur quelques questions clés: augmenter les investissements pour créer des emplois, contribuer à la stabilité et à la paix grâce à une réelle politique étrangère, de défense et de sécurité, et défendre les intérêts européens sur la scène mondiale.

Nous demandons peut-être trop, mais c’est bien le sens que nous mettons derrière une Europe de valeurs communes. Un espace qui nous permette de coopérer et de prospérer et nous offre la liberté de vivre comme nous le souhaitons. Un espace sûr dans le monde, où nos droits sont protégés, où toutes les possibilités nous sont ouvertes, qui que nous soyons et d’où que nous venions, et où nous pouvons tous réaliser tout notre potentiel. Une Union de l’espoir et de la possibilité. 

Ne perdons pas cela de vue. Le Parlement européen, seule institution élue directement par les citoyens, doit jouer un rôle de premier plan dans la promotion de ce changement. Nous avons besoin de voix – de vos voix – pour continuer à faire briller cette lumière. C’est pourquoi l’année prochaine, il est important que vous alliez voter aux élections européennes, et que vous convainquiez vos amis et votre famille d’aller voter.

C’est votre moment. 

Je vous remercie.