Nous devons nous unir comme jamais auparavant – La Présidente Metsola aux étudiants du Collège d'Europe 

 

Aujourd'hui, la Présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, a été invitée à prendre la parole lors de la cérémonie d'ouverture de la Promotion David Sassoli au Collège d'Europe à Bruges. Dans son discours, la Présidente Metsola a encouragé les étudiants à se lever, à servir et à diriger. "C'est le moment pour l'Europe de diriger. C'est à vous de diriger", a-t-elle déclaré.

© Union européenne | Allocution de la Présidente du Parlement européen, Roberta Metsola,
à l’occasion de la cérémonie d’ouverture de l’année universitaire 2022-2023 du Collège d’Europe, à Bruges

Madame la rectrice,
Madame la vice-rectrice,
Chère Alessandra,
Chers étudiants de la promotion David Sassoli, 

Permettez-moi tout d’abord de remercier la rectrice du Collège d’Europe, Federica Mogherini, de m’avoir invitée à prendre la parole devant vous aujourd’hui, et en particulier de me donner l’occasion – et le privilège – de rendre hommage à l’héritage laissé par mon prédécesseur et ami, David Sassoli, Patron de la promotion 2022-23 du Collège d’Europe. 

David Sassoli était un champion de la démocratie, un européen passionné et un défenseur de l’Union. Il était intimement convaincu que l’Europe constituait une voie nouvelle dans ce monde. Guidé par cette conviction, il s’est battu sans relâche pour réunir différents acteurs autour de la même table – j’en fis d’ailleurs moi-même partie. Son héritage m’accompagne en tant que Présidente du Parlement, et je me laisse souvent guider par ses paroles en ces temps difficiles. Le monde pourrait s’inspirer davantage de ses principes sans équivoque. 

David considérait que l’Europe devait être plus unie, plus proche de ses citoyens et plus fidèle à ses valeurs de dignité humaine, de liberté et de solidarité. Comme l’a déclaré un jour un éminent écrivain, ce sont les vocations qui font les grands hommes. David avait cette vocation. Il avait ce sens du service, dont il s’est toujours acquitté avec le sourire. 

Cette responsabilité est la mienne désormais puisque je lui succède, mais elle vous incombe également. Vous la portez aujourd’hui sur vos épaules. Ce privilège vous revient, car vous êtes la classe de David Sassoli. Inspirez-vous de son exemple. Je sais que vous lui ferez honneur, ainsi qu’à vous-mêmes, lorsque vous quitterez le Collège pour construire un monde meilleur, plus égalitaire et plus juste. En respectant les valeurs d’humanité, en tendant la main aux plus vulnérables, et en défendant, comme David, les principes sur lesquels s’est fondée l’Europe.

Je vous avoue que je suis très émue de revenir au Collège, ici à Bruges. Non seulement parce que c’est ici que j’ai fait mes études – promotion John Locke pour les curieux –, mais aussi parce que c’est ici que j’ai décidé de présenter ma candidature pour la première fois aux élections européennes en 2004.

Étudiante, j’étais engagée en politique parce que j’étais convaincue que la place de ma génération était en Europe, et j’en suis toujours persuadée. Notre génération ne fait plus la distinction entre la vieille et la nouvelle Europe, elle considère qu’il n’y a pas les grands États d’un côté et les petits de l’autre. Nous comprenons que l’Europe peut fonctionner en respectant la diversité des opinions, des idéologies, des religions, des langues et des nations, tout en restant ancrée dans ses valeurs communes. 

Il n’est pas toujours facile d’équilibrer les deux, mais dans notre Europe, c’est la force des arguments qui compte, et non leur volume sonore. L’intégrité, et non les propos à visée électoraliste. Voilà ce que le Collège m’a appris et ce que David Sassoli m’a montré. 

Et je crois que ce message devrait prendre plus d’ampleur, surtout en cette période de tous les périls pour l’ordre démocratique mondial. Tous les regards se tournent vers l’Europe depuis le début de la guerre illégitime et injustifiée menée par la Russie contre l’Ukraine. L’histoire nous jugera selon notre réponse, et ne vous y trompez pas, la proportionnalité, la rapidité et l’unité de notre action jouent un rôle dans cette réponse. 

Je suis fière que l’Union ait fourni une aide financière, militaire et humanitaire à l’Ukraine et à sa population, et nous continuerons d’ailleurs à le faire. Depuis le début du conflit, nous avons accueilli sept millions de femmes, d’enfants et d’hommes dans nos foyers et dans nos cœurs. Nous avons également adopté huit trains de sanctions pour faite obstacle au financement de la machine de guerre russe. Il nous faut garder le même esprit pour gérer les défis liés aux migrations. Notre devoir est de considérer les personnes comme des êtres humains, et non comme des statistiques, comme des vies, et non comme des chiffres. 

Huit mois se sont écoulés depuis que les chars russes ont envahi l’Ukraine indépendante et souveraine. Depuis, nous avons vu les Ukrainiens se battre avec courage pour leur pays et pour leur liberté. Stoïques devant l’adversité, les grands-mères ukrainiennes ont appris à défendre leur foyer et leur famille. Mais soyons clairs: les Ukrainiens risquent également leur vie pour l’Europe, pour préserver les valeurs auxquelles nous croyons tous: la liberté, la démocratie et l’état de droit. 

Les valeurs pour lesquelles David Sassoli a tant donné afin de les préserver et de les renforcer. Il nous appartient donc aujourd’hui de continuer à aider l’Ukraine et son peuple, pour qu’ils remportent cette guerre. Voilà ce qui est juste,  ce qui est nécessaire, ce qui doit avoir lieu. 

Chers étudiants de la promotion David Sassoli, l’Europe n’a pas ménagé ses efforts, mais l’heure n’est pas à la complaisance. Nous devrons en faire davantage. 

Je sais qu’en raison de la guerre qui sévit encore à nos frontières, de l’instabilité politique, du changement climatique, des fausses informations, des prix de l’électricité et de l’inflation, les jeunes sont confrontés à un niveau d’incertitude inédit pour beaucoup d’entre nous. 

L’Europe et le monde entier ont plus que jamais besoin de dirigeants responsables. Et je sais qu’être élu ne suffit pas à faire de vous un dirigeant. 

Un dirigeant doit être prêt à servir les citoyens, à défendre nos valeurs, et à prendre position sans hésiter dans les moments difficiles. Il se doit de reconnaître ses erreurs et d’affronter sans trembler le mécontentement que peuvent susciter ses actions. Mais il doit également reconnaître les avancées de notre Union, qui sont nombreuses. 

Il y a une certaine noblesse dans le fait de diriger, comme dans celui d’être au service de l’Union. 
J’ai toujours considéré la politique comme une force qui peut faire avancer les choses, comme le meilleur moyen de favoriser le changement. C’est la politique qui permet de nous renforcer en tant que communauté, en ne laissant personne de côté. C’est la politique qui permet de dépasser notre individualité au bénéfice du bien commun. C’est elle encore qui nous permet de prendre conscience que nous ne sommes pas en sécurité tant que nous ne le sommes pas tous, et que les plus faibles et les plus marginalisés d’entre nous font autant partie de notre communauté que toute autre personne. 

Si vous ne deviez retenir qu’un message de ma part aujourd’hui, que ce soit celui-ci: agissez. Choisissez de vous mettre au service de l’Union. Sachez diriger. 
Agissez en faisant entendre votre voix.
Participez activement.

Prenez en main les questions qui vous paraissent les plus importantes, dans les enceintes politiques, les collectivités locales, les ONG, le milieu professionnel, universitaire ou culturel. 

Et si vous avez du mal à vous faire entendre, et croyez-moi, cela arrivera, ne flanchez pas. Agissez pour l’Europe. Parce que notre projet mérite qu’on se batte pour lui. J’ai déjà évoqué ma première campagne pour les élections européennes, mais ce que j’ai omis de vous dire, c’est que je n’ai pas été élue lors de ma première tentative. Il m’a d’abord fallu frapper à de nombreuses portes, participer à d’innombrables discussions et à des centaines de débats, et m’y reprendre cinq ans plus tard avant de gagner enfin la confiance des citoyens. 

Je suis convaincue que vous êtes, vous aussi, à la hauteur de ce défi. Vous allez bénéficier cette année d’une expérience d’apprentissage riche et multiculturelle grâce à vos professeurs et universitaires. Vous n’allez pas seulement étudier l’Europe, vous allez aussi la vivre. N’hésitez pas à en tirer pleinement parti, car cette année va passer bien plus rapidement que vous ne le pensez.

Chers amis, je suis convaincue qu’ensemble, nous trouverons la voie à suivre qui répond aux besoins de la prochaine génération. Les dirigeants européens doivent rester unis pour combattre le cynisme et lutter avec fermeté contre les agressions. C’est une question de volonté politique. Et le Parlement n’en manque pas, croyez-moi.  

David Sassoli a déclaré un jour que «l’Union européenne n’est pas un accident de l’histoire», il avait raison, bien sûr. Notre Union n’est pas le fruit du hasard, mais le résultat concret d’un groupe de visionnaires. Elle a pris son essor grâce aux idées, aux efforts et à la force des mères et pères fondateurs du plus grand projet de paix au monde. 

Voilà le cap que nous devons maintenir. Les pères fondateurs ont lancé la machine et c’est à nous qu’incombe de la faire fonctionner.

Nous devons nous unir comme jamais auparavant. 
Le moment d’agir est venu pour l’Europe,
le moment d’agir est venu pour vous aujourd’hui. 
Je vous remercie.