80 ans après la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe, le Parlement européen se souvient des soldats tombés au combat et honore leur courage et leur sacrifice. La Présidente Metsola a accueilli trois hommes extraordinaires qui ont vécu la guerre et qui en portent encore le souvenir.
Monsieur le Président Costa, cher António, Mesdames et Messieurs les Députés, Chers invités, Chers vétérans, Chers amis,
Nous sommes réunis aujourd’hui, dans le siège de la démocratie européenne, pour commémorer un événement solennel et marquant: quatre-vingts années se sont écoulées depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale en Europe – le conflit le plus mortel et le plus étendu de notre histoire, et celui-là même qui a conduit à la création de notre Union.
Nous sommes réunis pour rendre hommage à ceux qui se sont battus et à ceux qui ont donné leur vie. Nous honorons leur courage, leur sacrifice et leur résistance face à la tyrannie. Nous n’oublions pas: les horreurs du chapitre le plus sombre de l’histoire européenne ne doivent jamais se répéter.
Ils se sont battus pour que nous puissions vivre en paix. Ils ont sacrifié leur vie pour que nous soyons libres. Ils ont tout risqué pour que nos enfants puissent grandir en sécurité. Nous ne les oublierons jamais.
Il y a quatre-vingts ans exactement, dans un bâtiment scolaire en briques rouges de Reims – à quelques heures à l’ouest d’ici –, l’Allemagne nazie signa sa capitulation inconditionnelle, mettant ainsi fin à la guerre sur le sol européen.
Le lendemain matin, les canons s’étaient tus. À Londres, Paris, Prague, la population sortit en masse dans les rues, pour s’embrasser, chanter et pleurer – de joie, de soulagement, mais aussi de douleur.
Beaucoup avaient pensé ne jamais voir ce jour. Après près de six longues années, la guerre en Europe était enfin terminée.
Mais pour des millions de personnes, la paix venait trop tard: des dizaines de millions de vies perdues, dont six millions de Juifs, des communautés entières décimées, des générations entières disparues à jamais, des villes entières réduites en cendres. Famine, déplacements et maladies avaient été le lot de beaucoup des survivants.
Toute une génération porterait la marque de ce traumatisme en silence. Des millions d’enfants dans toute l’Europe grandiraient sans père. Des millions d’épouses vivraient sans mari. La guerre était finie, mais les blessures étaient profondes.
Et pour des millions de personnes en Europe, l’année 1945 ne leur apporterait pas la libération, mais un changement d’oppresseur. Staline gagnant du pouvoir dans l’Est, un Rideau de fer allait s’abattre sur l’Europe, scindant des pays, des familles et des vies. À Varsovie et à Riga, à Bratislava et à Berlin-Est, la fin d’un combat en ouvrait un autre. Il leur faudrait encore des dizaines d’années avant d’être réellement libres.
La guerre laissait une Europe en ruines, mais elle n’avait pas pu briser son esprit. À travers le continent, la population entreprit – avec sérénité et dignité – de reconstruire. Une reconstruction faite de briques et d’espoir aussi.
Tous ces noms que portent les bâtiments de notre Parlement – Schuman et Adenauer, Spaak et De Gasperi, Churchill et Monnet – sont ceux d’hommes qui ont vécu la guerre, qui ont enterré des frères, perdu des amis, et vu des villes brûler. Pourtant, ils ont fait le choix de la réconciliation plutôt que de la vengeance. Ils ont choisi de croire que d’anciens ennemis pouvaient devenir des alliés, que la coopération n’est pas une faiblesse, mais une nécessité.
Une nouvelle Europe est née grâce à leur courage: une Europe rejetant le poison du passé et osant bâtir la paix. C’est grâce à eux que nous sommes ici aujourd’hui, dans un Parlement de nations anciennement ennemies et aujourd’hui amies, unies par une promesse commune: plus jamais.
Il y a quarante ans, le président Ronald Reagan s’est adressé à ce Parlement dans des termes exprimant sa profonde admiration pour ce qui avait été accompli. Voici les mots qu’il a prononcés:
«Europe, chère Europe, tu es plus grande que tu en as conscience. Tu es la gardienne de siècles de pensée et de culture occidentales, le père des idéaux occidentaux et la mère de la foi occidentale.
Europe, tu es la puissance et la gloire de l’Ouest, et une réussite morale. Malgré les horreurs qui ont suivi la Seconde Guerre mondiale, tu as refusé le totalitarisme; tu ne t’es laissée tenter ni par l’attrait de la nouvelle superpuissance ni par celle du nouvel homme communiste; tu as prouvé que tu étais et que tu es un triomphe de la morale.
Vous, à l’Ouest, formez une Europe sans illusions, une Europe fermement ancrée dans les idéaux et les traditions qui font sa grandeur, une Europe libre des entraves d’une idéologie creuse. Vous constituez aujourd’hui une nouvelle Europe à l’aube d’un nouveau siècle, une communauté démocratique qui a de quoi être fière.»
Le président Reagan ne faisait pas que reconnaître le chemin parcouru par l’Europe, il appelait également à protéger ce qui avait été bâti.
Nous serons pour toujours redevables aux hommes et aux femmes qui ont rendu cette paix possible. Certains d’entre eux sont avec nous aujourd’hui.
J’ai le grand honneur de souhaiter la bienvenue à trois hommes extraordinaires qui ont vécu cette guerre et en sont la mémoire: M. Robert Chot M. Janusz Komorowski M. Janusz Maksymowicz
À vous – et à tous ceux qui ne sont pas avec nous aujourd’hui –, nous pouvons simplement dire: merci.
Votre courage a illuminé les heures les plus sombres de l’Europe. Vous avez risqué votre vie pour que nous puissions vivre la nôtre. Vous avez choisi de résister. Vous avez choisi d’espérer. Nous n’oublierons jamais.
Quatre-vingts années se sont écoulées. Mais l’histoire n’est pas finie. La guerre est de retour sur notre continent. De nouveau, des villes sont bombardées, des civils attaqués, des familles déchirées.
Le peuple d’Ukraine ne se bat pas seulement pour son pays, mais aussi pour la liberté, la souveraineté et la démocratie. Tout comme nos parents et grands-parents l’ont fait avant eux.
Ce Parlement soutiendra toujours ceux qui cherchent la paix et s’opposera à ceux qui la détruisent. Il soutiendra toujours la liberté et s’opposera à la tyrannie. La tâche qui nous attend aujourd’hui est toujours la même:
Honorer les mémoires. Protéger la démocratie. Préserver la paix. Une paix juste, réelle et durable.
Je vous remercie.