La Présidente Metsola reçoit le titre de Docteur Honoris Causa à Łódź, en Pologne  

 

La Présidente Metsola reçoit le titre de Docteur Honoris Causa à Łódź, en Pologne  

Łódź  
 
 

La Présidente du Parlement européen, Roberta Metsola, a reçu le titre de Docteur Honoris Causa de l'Université de Technologie de Łódź. Dans son discours, la Présidente Metsola a déclaré que cet honneur implique la responsabilité de continuer à œuvrer chaque jour avec courage et détermination pour une Europe qui défend les valeurs de paix, de démocratie et de liberté.

       

Monsieur le Recteur,
Chers sénateurs,
Chers députés au Parlement national et au Parlement européen,
Chers représentants du gouvernement et des autorités locales,
Chers invités,
                                                                          
Merci. Dziękuję.
 
C’est un réel honneur pour moi de recevoir ce titre de docteure honoris causa de l’université polytechnique de Łódź – une université qui a ses racines dans le passé industriel de cette grande ville et est devenue un moteur de l’Europe de demain. Je vous remercie d’être présents en ce vendredi de début de saison estivale, qui se trouve de surcroît être un lendemain de jour férié.
 
La ville de Łódź a traversé les heures les plus sombres de notre histoire, et s’en est relevée. Elle est retombée sur ses pieds, a relancé ses usines et a fait renaître l’espoir. Son histoire est un peu celle de l’Europe.
 
Notre Europe a été construite par des femmes et des hommes qui ont refusé d’accepter ce qui était et ont osé imaginer ce qui pouvait être, par des géants qui ont su briser le cycle de l’histoire et bâtir la paix et la prospérité sur les ruines de la guerre. À chaque moment charnière, ces personnes ont pris le chemin le plus ardu, ont fait le choix le plus difficile.
 
Des symboles comme le pape Jean-Paul II, Lech Wałęsa et les héros de Solidarność ont montré que le courage et l’union avaient le pouvoir de changer le cours de l’histoire, que la détermination et le sens moral pouvaient avoir le dessus sur des empires.
 
Ce sont les «Européens», ceux qui personnifient les valeurs de notre projet. Tel est l’héritage de l’Europe qu’ils nous ont laissé à tous, et nous devons nous en montrer dignes.
 
Présidente du Parlement européen, je fais partie d’une génération de politiques européens amenés à diriger dans un monde qui semble souvent être à feu et à sang. Et nous devons être prêts à faire des choix difficiles.
 
Aucun d’entre nous ne s’attendait à ce qui est arrivé le 24 février 2022.
 
L’invasion de l’Ukraine par la Russie était une attaque contre nous tous, contre nos valeurs, contre notre idée de la souveraineté, de la démocratie et de la liberté même. Aujourd’hui, les Ukrainiens sont en première ligne face au poing brutal et impitoyable de la tyrannie. Leur combat est notre combat.
 
L’action du Parlement européen ne s’est pas fait attendre. Nous avons pris l’initiative de la mise en place d’un soutien critique en Ukraine là où il pouvait avoir le plus grand effet. Et nous continuons d’œuvrer sans relâche en faveur d’une paix réelle, juste et durable.
 
Nous sommes aussi confrontés à un autre défi au Moyen-Orient, un défi qui nous rappelle à quel point la paix est fragile. La situation là-bas est très inquiétante, aussi bien pour la région que pour l’Europe.
 
Il y a trois jours, le roi Abdallah II de Jordanie a prononcé un discours au Parlement européen à Strasbourg. Il nous a rappelé que: «Nous devons nous reconnecter à nos valeurs. Car lorsque le monde perd son sens moral, son sens commun du bien et du mal, de ce qui est juste et de ce qui est cruel – alors, un conflit n’est jamais loin».
 
Le monde a conscience que l’Iran ne doit pas avoir l’arme nucléaire. Ce serait une menace non seulement pour la région, mais aussi pour le monde entier. Vu les événements de ces derniers jours à Tel Aviv et à Téhéran et leurs possibles répercussions, l’Europe a un rôle plus crucial que jamais à jouer pour obtenir une résolution et une désescalade à grande échelle.
 
C’est la raison pour laquelle nous continuons de demander un cessez-le-feu à Gaza, où la souffrance de la population est insupportable. C’est aussi la raison pour laquelle nous continuons d’insister en faveur du retour des otages, de la fin du terrorisme, de l’accès de l’aide humanitaire à ceux qui en ont le plus besoin et d’une perspective de gouvernance palestinienne légitime ainsi que de sécurité pour Israël.
 
Dans les prochains jours, je me rendrai donc aux Émirats arabes unis. Car on ne peut bâtir la paix que par la confiance, le dialogue et la responsabilité partagée.  Car, en fin de compte, c’est en des temps difficiles comme aujourd’hui que l’on se tourne vers notre drapeau européen à la recherche de clarté et de leadership.
 
Nous pouvons être la génération de femmes et d’hommes politiques qui brise le cycle de l’histoire et construit une paix réelle et durable. Et les Européens savent que c’est en gardant l’espoir que nous y parviendrons. L’espoir comme remède à la désolation. Voilà ce que je veux que l’Europe laisse en héritage.
 
L’Europe a le pouvoir de changer des vies. C’est une conviction que j’avais déjà en grandissant sur une île au sud de la Méditerranée, un pays pour lequel l’Europe était plus qu’un projet politique, c’était une promesse: la promesse de frontières qui s’ouvriraient, de chances qui fleuriraient, la promesse qu’une jeune fille pouvait participer à la construction de quelque chose de plus grand qu’elle. C’est cette conviction qui m’a conduite en politique et elle m’anime toujours aujourd’hui.
 
 
En Pologne aussi, vous connaissez le pouvoir de l’Europe, celui d’ouvrir des possibilités, de protéger la liberté. Vous en avez fait l’expérience et vous y croyez. La Pologne a connu l’une des métamorphoses les plus incroyables en Europe: elle est devenue une démocratie dynamique, une économie florissante et une voix de poids parmi les nations européennes.
 
Je tiens à vous remercier du leadership dont vous avez fait preuve lors de la présidence tournante du Conseil de l’Union européenne exercée par votre pays, laquelle arrive au terme de ses six mois dans quelques jours. Vous avez montré que l’Europe peut être un partenaire des entreprises, que nous pouvons faciliter les choses pour notre population, que nous pouvons défendre nos valeurs haut et fort – en particulier lorsque nous sommes menacés.
 
Mais soyons honnêtes: dans toute notre Union, la population est fébrile. Les citoyens ont le sentiment de ne pas être entendus, ils pensent que le changement est trop lent, ils trouvent que les décisions sont prises trop loin d’eux.
 
Nous devons les écouter, et leur montrer que l’Europe apporte des réponses. Pas seulement pendant les élections, mais tous les jours. L’Europe, ce n’est pas seulement Bruxelles ou Strasbourg. Ce sont des individus: des étudiants, des familles, des travailleurs, des entrepreneurs – dans des villes comme Łódź.
 
La Pologne a toujours été une terre d’entreprise et d’innovation. Marie Skłodowska-Curie – qui reste la seule personne à avoir reçu un prix Nobel dans deux catégories scientifiques – était l’une des vôtres. Je vois le même esprit de découverte ici: dans vos amphithéâtres, vos laboratoires et vos start-ups.
 
Pourtant, à travers l’Europe, nous perdons nos cerveaux les plus brillants, attirés par de meilleurs débouchés ailleurs.
 
Comme vous l’avez dit, j’ai quatre fils. Il y a quelques heures, mon aîné a passé son épreuve de bac de chimie. Il veut être ingénieur, et il doit pour ce faire commencer par réussir ses examens. Je veux qu’il ait un avenir en Europe, qu’il s’épanouisse et s’établisse ici, qu’il découvre, comme vous tous. À vous qui, ici, êtes étudiants, je sais que vos parents veulent tous la même chose pour vous.
 
La nouvelle révolution industrielle a déjà commencé. Si nous voulons être à l’avant-garde dans le domaine de l’intelligence artificielle, qui s’impose déjà partout, mais aussi de la technologie propre ou de la biotechnologie, nous devons agir dès à présent, en attirant les investisseurs en Europe, en réduisant les démarches administratives et en libérant tout le potentiel de notre marché unique, en particulier dans des secteurs comme l’énergie ou la défense.
 
Mais en réalité, tout cela implique d’investir dans les personnes. Car la véritable force de l’Europe ne réside pas dans ce qu’elle fait, mais dans ce qu’elle sait.
 
La demande de travailleurs très qualifiés est en forte hausse, surtout dans les secteurs de la construction, de la fabrication et de l’énergie. Ces secteurs n’ont pas tant besoin de main-d’œuvre que d’expertise technique de pointe.
 
Votre université l’a bien compris. Elle forme les ingénieurs, les scientifiques et les architectes de l’Europe de demain. Elle modèle les dirigeants qui feront avancer notre continent.
 
Je veux une Europe où les idées nées ici à Łódź deviendront les licornes de demain, où prendre des risques est dans notre culture, où un échec ne sonne pas la fin, mais le début d’une nouvelle aventure. Je veux une Europe bâtie sur un socle de simplicité et de possibilité.
 
Mais cette Europe ne peut exister sans sécurité. Sans paix, il ne peut y avoir de prospérité.
 
Les dépenses en matière de défense sont maintenant en hausse dans tous les États membres, la Pologne en tête. Au sommet de l’OTAN qui s’ouvrira la semaine prochaine, les Alliés devraient convenir d’un nouvel objectif de dépenses de 5 % du PIB. Cela a son importance, surtout pour un pays à la frontière de l’espace couvert par l’Alliance, comme la Pologne.
 
Nous voyons une Europe qui, en dépit de tous ces défis, vole de ses propres ailes et a confiance dans sa propre force. Nous voyons une Europe qui défend les valeurs sur lesquelles repose notre grande Union: la liberté, la dignité et l’équité.
 
Notre mission, celle de tous ceux qui appartiennent au service public, est de montrer que ces valeurs ne sont pas que de vagues paroles du passé, mais aussi des promesses pour l’avenir. Nous devons montrer que l’avenir peut être meilleur que le présent.
 
J’ai déjà mentionné le discours du roi Abdallah II au Parlement européen cette semaine. Je remonterai plus loin, en 1988, lorsque Jean-Paul II a affirmé au Parlement européen que les hommes et les femmes dans l’hémicycle étaient «la meilleure sauvegarde de l’identité, de la liberté et du progrès de l’Europe». Tel est notre héritage. Tel est notre devoir. Tel est l’étalon à la hauteur duquel nous devons rester.
 
Des usines de Łódź aux chantiers navals de Gdańsk, des découvertes de Marie Skłodowska-Curie au triomphe de la démocratie dans votre pays, vous avez montré ce qu’il est possible de faire lorsque l’on croit à quelque chose de plus grand que soi-même.
 
C’est l’esprit dont l’Europe a besoin aujourd’hui: l’espoir de croire encore, le pouvoir de réimaginer, le courage de saisir le pouvoir des trois mots qui ont marqué ma génération:  “Nie lękajcie się.” – N’ayez pas peur.
 
Telle est notre Europe.
 
Dziękuję bardzo.